Une ingénieure Isara lauréate du Prix DEMETER 2020
Louise Blanc, ingénieure Isara promotion 47, a reçu le prix Demeter 2020 dans la catégorie « travail de recherche individuel », pour son mémoire de fin d’études : Quelles alternatives au glyphosate en agrumiculture corse ?
La cérémonie de remise des prix DEMETER s’est tenue le 25 février 2020, sur le stand de FranceAgriMer, dans le cadre du Salon international de l’agriculture, en présence de Christine Avelin, directrice générale de FranceAgriMer et de Jean-François Isambert, président du Club Demeter.
Résumé et principales conclusions des travaux menés par Louise
Le travail de recherche réalisé par Louise répond à la volonté de plusieurs producteurs d’agrumes souhaitant anticiper le retrait du marché du Glyphosate. Pour la majorité des agrumiculteurs produisant sous l’IGP Clémentine de Corse, le glyphosate est le seul et dernier herbicide autorisé par le cahier des charges du label. Le retrait du marché d’une telle molécule amène donc la filière à faire face à une impasse technique.
La piste du désherbage mécanique est celle envisagée par les arboriculteurs. Or, elle présente de nombreuses limites : chronophage, coûteuse, dépendante des énergies fossiles, déstructurante pour le sol et polluante pour l’air.
Pour répondre à cette problématique, Louise a sélectionné — avec l’appui de sa maître de stage — deux pratiques — le paillage en fibre végétale et l’enherbement artificiel du rang — pour leurs avantages agronomiques, leur accessibilité sur la Corse, leur faible coût et leur rapidité d’installation.
Elle a ensuite testé ces deux pratiques à travers des essais expérimentaux en collaboration avec cinq producteurs volontaires.
Ce travail d’études représente une innovation pour les agrumiculteurs dans le sens où il adopte un regard nouveau dans la lutte contre les adventices. Les méthodes testées sont nouvelles pour les arboriculteurs. Aucun d’entre eux n’avait encore testé des pratiques alternatives à la chimie ou au désherbage mécanique.
Témoignage de Louise Blanc :
« L’enherbement du rang préconisé à l’issue du stage est une véritable révolution dans la perspective historique de la lutte contre les adventices. Les agriculteurs ont toujours cherché à éliminer les végétaux « indésirables ». Ici au contraire, au lieu de lutter contre l’enherbement, on travaille avec lui, on apprend à mieux le connaître pour le sélectionner, l’apprivoiser et en faire un atout pour l’agroécosystème. Ceci permet d’avoir des systèmes d’exploitation plus résilients : le couvert végétal limite l’érosion, favorise la vie du sol et l’accueil des auxiliaires de cultures. Il permet ainsi d’augmenter la biodiversité au sein des parcelles et d’être plus économe en énergie fossile.
Sur le plan logistique, cette technique est aussi avantageuse, car elle demande moins de temps que le désherbage chimique ou mécanique. Ainsi, en six mois, il a été possible d’adapter des solutions à un contexte précis, de manière efficace, abordable, et ainsi de démontrer que performances économiques et environnementales sont conciliables en agriculture.
Ma posture de jeune ingénieure a permis d’apporter un regard nouveau sur une problématique vécue comme insoluble en m’émancipant des « barrières » issues de décennies d’habitudes. Ce stage a créé un lien concret entre la recherche scientifique et le terrain agricole.
La première bataille se gagne en effet dans les consciences. Ici, j’ai réussi à convaincre une majorité d’agrumiculteurs de se lancer dans une démarche alternative. Ils ne voient plus la suppression du glyphosate comme une menace, mais plutôt comme une opportunité pour leurs exploitations. La transition vers la réduction d’utilisation d’herbicide est donc à notre portée.
Il faut favoriser les projets collectifs, collaboratifs et fédérateurs qui établissent des ponts entre la recherche et les agriculteurs. Ces ponts permettent aux exploitants de s’adapter sans être stigmatisés : gardons à l’esprit ce que disait Albert Einstein « les problèmes d’aujourd’hui sont les solutions d’hier. »
Écosystème associatif regroupant 65 entreprises du secteur agricole et agroalimentaire, le Club Demeter a pour mission de réfléchir de manière prospective aux enjeux internationaux et aux solutions innovantes pour préparer les mondes de demain.
Dans le cadre de l’initiative Interfaces Formation (IF), qui regroupe un réseau de 18 écoles partenaires de l’enseignement supérieur dont l’Isara, spécialisées dans l’agriculture, les sciences politiques, l’économie, le management, la communication ou les relations internationales, le Club Demeter a mis en place un prix. Celui-ci récompense, de manière individuelle ou collective, le travail des étudiants de ces écoles, qui peut prendre différentes formes : écrits, enquêtes sur le terrain, vidéos, documentaires, expositions…
Cette année, les travaux du prix Demeter portaient sur des thématiques transversales : non seulement l’agriculture, l’alimentation la ruralité, la société, mais aussi sur la géopolitique, l’économie, la logistique et le développement.