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Les étangs : un potentiel insoupçonné face au réchauffement climatique

L’étang, cette étendue d’eau au bord de laquelle il fait bon se promener le dimanche après-midi…Saviez-vous que derrière son apparence paisible, se cache un potentiel insoupçonné d’atténuation du réchauffement climatique ?

En séquestrant durablement les gaz à effet de serre, les étangs sont au cœur du projet Européen PONDERFUL (POND Ecosystems for Resilient Future Landscapes in a Changing Climate) sur lequel travaille une équipe de dix chercheurs de l’Isara.

Analyse d’un étang de la Dombes

Quand un petit plan d’eau se révèle être un puits de carbone

À l’image des océans et des forêts, les étangs sont de véritables « puits de carbone », grâce à l’activité de photosynthèse des végétaux et des microalgues qui les peuplent. En utilisant l’énergie du soleil et le C02 de l’air, ils fabriquent leur propre matière organique, enfermant le carbone dans leurs tissus. A leur mort, le carbone reste séquestré durablement dans les débris constituant la vase. C’est ainsi que de l’Angleterre à l’Espagne, en passant par le Danemark et la Turquie, plus de 400 étangs sont étudiés pendant 4 ans, au travers du projet PONDERFUL.

Observer leur fonctionnement, mesurer les entrées et les sorties de dioxyde de carbone et mais aussi de méthane, analyser les résultats… les chercheurs de l’Isara s’unissent ainsi, aux autres pays d’Europe pour collecter une gigantesque base de données et mettre en lumière l’utilité des étangs dans la lutte contre le réchauffement climatique.

Des premiers résultats provenant de la Suisse montrent d’ailleurs qu’à surface équivalente, un étang stockerait 7 fois plus de carbone qu’une forêt bien gérée. On comprend mieux la nécessité de maintenir les étangs, eux qui représentent entre 40 et 50 % des eaux stagnantes continentales.

Mais au-delà de leur intérêt avéré pour capter nos excès de carbone atmosphérique, les étangs nous rendent également de nombreux autres services environnementaux.

Quand le maintien des étangs concourt à la préservation de la biodiversité d’un territoire

Les étangs ont un rôle indispensable dans le stockage de l’eau de pluie, la temporisation des ruissellements de surface et le contrôle des crues. Moins connu mais pourtant tout aussi essentiel, ils captent de nombreuses pollutions protégeant ainsi les milieux environnants et les nappes d’eau souterraines dont ils participent au remplissage.

Ce sont également des lieux de loisirs, de production de poissons et avant tout de véritables réservoirs de biodiversité. En effet, au niveau d’un étang foisonnent des milliers d’espèces végétales et animales dont certaines n’existent que par la présence de ces eaux douces (pour se reproduire ou effectuer le début de leur cycle de vie comme les larves d’insectes, de diptères, les libellules…).

Les scientifiques ont montré que 70% de la biodiversité des eaux douces d’un territoire, se situait très précisément dans ces petites étendues d’eau. L’action de l’Homme et le climat ont déjà effacé de la carte entre 50 et 90% des étangs depuis près de 200 ans, emportant avec eux une grande part de biodiversité, fondamentale aux écosystèmes locaux.

Maintenir les mares et étangs actuels dans toute la diversité qu’ils représentent à travers l’Europe, est ainsi un objectif fort du projet PONDERFUL. Les chercheurs ont même développé des prototypes pour les récréer. Des modèles de petits plans d’eau, résilients face au réchauffement climatique appelés ClimaPond, sont déjà testés sur des sites expérimentaux pour voir le jour prochainement.

Des résultats scientifiques mais pas que…

Avec le programme PONDERFUL, les chercheurs qui étudient depuis plus de 20 ans ces plans d’eau, voient leur travail valorisé dans un seul et même projet commun. Un historique de données scientifiques sur toute l’Europe qui peut peser dans la balance pour faire évoluer la perception des étangs par les politiques. Car au-delà des résultats scientifiques, les chercheurs souhaitent une vraie reconnaissance des étangs par la législation.

A l’heure actuelle, leur petite taille (inférieur à 50 ha selon la définition d’un étang) fait qu’ils ne sont pas pris en compte dans la Directive Cadre sur l’Eau en Europe et donc peu protégés. Les arguments tangibles sur la solution climatique qu’ils apportent, permettraient d’étendre et d’homogénéiser les ré-glementations à tous les milieux aquatiques, toute taille confondue.

Et pour engager les parties prenantes sur le terrain, les chercheurs de l’Isara sont à l’initiative de séances de travail en lien direct avec les acteurs du territoire. Accompagnés d’un sociologue de l’environnement, ces échanges permettent d’appréhender réellement ce que pensent les décideurs et le grand public de ces plans d’eau trop souvent sous-estimés. Une manière de rendre accessible les avancées scientifiques et les résultats du projet, tout en éveillant les consciences sur la préservation urgente des étangs et autres petits milieux aquatiques, pour le futur climatique de notre planète.

par Marion Huré, Ingénieure agronome et rédactrice

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